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Photo du rédacteurLuc Simard

Le fardeau indésirable dont hérite un gestionnaire issu de la diversité

Dernière mise à jour : 11 déc. 2023

Beaucoup d'organisations réalisent qu'un manque de représentativité dans leur effectif de gestionnaires est de moins en moins justifiable. Pressées par leurs actionnaires, par leurs clients ou par les citoyens, certaines accélèrent la promotion des employés issus de groupes marginalisés à des postes de cadres. Non seulement cela améliore-t-il leur image mais en plus, des recherches l'ont démontré, leur créativité, leur productivité et leur rentabilité s'en trouvent augmentées.


Il faut célébrer ce mouvement car la classe des gestionnaires offre toujours un miroir déformant de la société: au Québec et au Canada, les trois-quarts des gestionnaires sont des hommes blancs ! Les cadres sous-représentés sont des femmes, des personnes racisées, des gens en situation de handicap ou des Autochtones.


Mais lorsqu'un employé issu d'un de ces groupes devient gestionnaire, il hérite sans le vouloir d'un lourd fardeau.


Il devra d'abord se défendre de la perception qu'il a obtenu son poste à cause de son identité. Que sa promotion, autrement dit, n'est pas la simple reconnaissance de ses compétences mais qu'elle serait plutôt le résultat d'un favoritisme envers les groupes en quête d'équité.


Et ce n'est qu'un début. Une fois en poste, il devra constamment combattre l'impression qu'il réserve un traitement de faveur aux employés qui, comme lui, proviennent d'une communauté marginalisée. Chacune de ses décisions sera scrutée à la loupe par des collègues ou par des employés qui chercheront la moindre occasion pour confirmer leur préjugé.


Si le gestionnaire issu de la diversité se voit confier la responsabilité de mettre en oeuvre l'EDI (équité, diversité et inclusion), il écope d'un nouveau fardeau.


D'abord, il sera vu par plusieurs comme un champion capable, à lui seul, de démanteler les barrières systémiques limitant l'avancement des communautés traditionnellement désavantagées. Or ces barrières, comme l'accès verrouillé aux réseaux d'influence, ne peuvent tomber sans l'engagement de l'ensemble des cadres. Et pour mobiliser ceux-ci, il aura besoin de personnel et de budgets qui ne seront pas souvent à sa disposition. S'il ne parvient pas à obtenir ces ressources, il aura le sentiment de n'être qu'un messager de belles valeurs incapable de susciter des changements réels dans son organisation.


Le gestionnaire qui porte tout ce poids sur ses épaules finira bien souvent par se décourager. Et petit à petit, il verra poindre un fardeau supplémentaire, peut-être le pire de tous: l'impression d'être instrumentalisé. Les attentes à son égard, en provenance de la haute direction, de ses collègues gestionnaires et des employés, lui apparaîtront de plus en plus irréalistes. C'est ce sentiment que, sous l'influence de l'anglais, on appelle le «tokénisme». Le gestionnaire a alors la sensation d'être le prisonnier d'une diversité de façade.


Pendant ce temps, le gestionnaire lambda, qui est un homme blanc, n'aura qu'un seul fardeau à porter, soit la responsabilité habituelle qui incombe à tout cadre. Celle-ci est contraignante, j'en conviens, mais elle est plus légère que celle portée par son collègue gestionnaire issu d'un groupe d'équité.


Il est cependant possible d'éviter la pente glissante qui mène au «tokénisme». J'indiquera dans un prochain billet quels moyens sont à la portée des organisations pour éviter de surcharger sans raison leurs gestionnaires issus de la diversité.



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2 Kommentare

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Luc Simard
Luc Simard
12. Dez. 2023

Bonjour Benjamin,

Je te remercie pour le courage que tu montres en témoignant de ton propre parcours. Je t'admire pour continuer d'avancer malgré le fardeau et les obstacles! Et je partage ton opinion que ce vivre ensemble doit se construire... ensemble ! À bientôt !

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Gast
11. Dez. 2023
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Bonjour Luc, bonjours lecteurs·lectrices. Quel sujet interpellant puisque toute promotion se doit d'être un motif de célébration. Et je souligne que certes, c'est une réalité vécue pour plusieurs personnes issues de la diversité dans son ensemble. J'aimerais donc partager de mon expérience et celle aussi des personnes de la diversité qui ont cheminé dans les embuches abordées dans ton billet, j'en suis une moi-même. En portant ce fardeau indésirable et involontaire, nous avons une opportunité en or de témoigner du contraire, et ce n'est pas sans douleur, j'en convient, de montrer l'envers de la médaille et contribuer au succès de l'organisation, devenant ainsi des ambassadeurs·ambassadrices de la diversité. Divulguer ces situations comme tu viens de le faire est un pas…

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